L’histoire biblique du patriarche Noé a donné à l’olivier une place inoubliable : pour lui signifier qu’il y avait de la terre sèche où poser pied à la fin du déluge (Dieu faisait la
paix
avec les hommes), la colombe lui a rapporté un brin d’olivier. Il y a peu, Picasso peignait la colombe de la paix:
Le dernier mot appartiendra à l’Histoire romaine, à qui nous devons tant, spécialement en Provence :
Avec la vigne, et le figuier, l’olivier fait partie des plantes fondamentales : osons le mot : sacrées.
(Le blé est une plante annuelle absolument nécessaire, mais il faut le semer chaque année). L'aire du Figuier, de l'Olivier et de la Vigne (en latin, Ficus, Olea, Vitis) est une zone sacrée de l'esplanade du Forum Romain, située
dans le site archéologique le plus important de Rome ; elle n'est pas pavée et là poussent un figuier, un olivier et un pied de vigne.
D) Épilogue : et maintenant, on fait quoi ?
Il résulte de ce qui précède, que le développement des oliviers dans le pays de Fayence requiert plusieurs mesures :
– protection draconienne : il conviendrait de trouver le moyen légal d’interdire aux constructeurs immobiliers de scier ou d’arracher les oliviers
– pour produire, il faut maintenant de l’eau d’arrosage : la Régie de l’eau doit changer de paradigme, et octroyer à des conditions préférentielles de l’eau d’arrosage à des amateurs, et pas seulement aux professionnels agricoles, à qui tout le respect est dû.
– le patrimoine génétique étant exceptionnel, l’association des oléiculteurs du Pays de Fayence poursuivra ses identifications (... et ses découvertes) sous l’autorité de France
Olive ; le moment venu, un répertoire électronique public sera constitué, avec les arbres de référence, que l’on pourra visiter.
–éléments commerciaux : le pouvoir d’achat sur la Côte d’Azur étant important, il serait porteur d’adopter une étiquette en partie commune à tous les oléiculteurs du Pays de Fayence. Certes, les volumes réellement mis en vente sont faibles, mais il est permis d’espérer que la production se développe. (Beaucoup d’huile est donnée, elle peut aller jusqu’en Allemagne, au Danemark, au Bénélux, au Royaume-Uni...). Les 4 moulins à huile8 sont fermés pendant la saison touristique, c’est normal mais c’est fort dommage : l’office du tourisme intercommunal (la maison du lac), envoie les demandeurs au moulin de Callas. Ne pourrait-on instaurer un programme partagé, pour que chacun des moulins ouvre à tour de rôle pendant les semaines d’affluence touristique, en été (exemple : 2 demi-journées par semaine par moulin)?
Photo moulin Pierre Stalenq, Fayence : chaîne continue, olives à un bout, huile à l’autre bout 2 heures après
Les lecteurs intéressés peuvent adhérer (30 €/an, voir le site web et les formations) : ils sont bienvenus.
2 « Arbre remarquable de France » est un label décerné, depuis 2000, après étude de dossier, par
l'association A.R.B.R.E.S. (Arbres Remarquables : Bilan, Recherche, Études et Sauvegarde) qui effectue un
inventaire à l'échelle du territoire national. Les arbres ainsi distingués sont signalés par un panneau « Arbre
remarquable de France »
Ce label distingue des sujets exceptionnels, au nombre d'environ 700 arbres en 2019 ainsi que des ensembles
arborés remarquables.
3 oleiculteursdupaysdefayence.fr
4 L’association de se tient à disposition pour préciser l’endroit.
pas bonheur à l’olivier »
7 Xylella fastidiosa ; cette résistance n’est pas encore prouvée absolument.
15 décembre 2021
LES BERGERS DE PROVENCE
Métiers oubliés et mémoire des temps
Gérard Saccoccini
En ces temps calendaires il est bon de rappeler la place prépondérante occupée par les bergers dans les sociétés qui se sont succédées depuis le néolithique. Selon un rituel immuable en accord parfait avec le cycle des saisons, ils ont guidé des milliers de troupeaux par les passages naturels des drailles*(1), conduisant par monts et par vaux depuis les plaines d’hivernage jusqu’aux plateaux alpins de l’estive.
Au moyen-âge, de la Provence rhodanienne à la Comté niçoise, la transhumance rassemblait près de 80 000 brebis regroupées en abeillers*(2), sous l’autorité du bayle*(3) assisté de ses compagnons bergers. L’intendance et l’administration du convoi étaient assurée par la robe*(4), une organisation complexe, véritable état-major comprenant des dizaines d’individus aux fonctions très précises pour assurer la mounta et la devala*(5),commepréparer les campements, le transport des personnes et du matériel, l’approvisionnement, le tracé des routes choisies et la traversée des villages incluant taxes et dédommagements divers.
A titre d’exemple, en 1784, un abeiller de 400 000 mérinos du pays d’Arles dut débourser, pour dédommager les riverains, 28 sols par tête (546 000 livres, près de 150 000 euros). Parmi les diverses taxes figuraient le droit de « pulvérage », pour la poussière produite par le passage des bêtes, le droit « laitier » pour l’installation de cabane de traite et celui de « fromagère » pour la transformation en fromages !
Pour constituer un abeiller, il fallait parfois attendre quelques jours afin de pouvoir regrouper tous les troupeaux sur un point de rendez-vous fixé : une place de village ou un grand champ. Afin d’éviter les insolations sur les brebis exposées immobiles au soleil, les bayles devaient prendre en charge les plantations d’ombrages pour les abriter.
Les hommes de la robe veillaient aussi à la sécurité et à la protection des troupeaux en engageant, lorsque nécessaire, des cavaliers armés et des mâtins de Naples aux colliers de fer hérissés de pointes acérées. Selon la configuration géographique, notamment sur les immenses plans du Verdon où les troupeaux étaient très dispersés, les bergers montaient parfois des chevaux ou utilisaient des échasses pour une vision plus étendue. Cette pratique serait à l’origine du nom « Falaise des cavaliers » donné à une partie de la rive Sud des gorges.
Il fallait scrupuleusement consigner toutes ces dépenses dans des livres comptables tenus par les « écrivains » de la robe, afin de justifier des dépenses du voyage auprès des nourriguiers*(6).
La silhouette immuable du berger a été immortalisée par les santonniers de Provence : le grand chapeau de feutre à larges bords, la cape, la limousino de cadis*(7) dans les plis de laquelle s’engouffre le mistral glacial, sans oublier le long bâton noueux de sorbier. Elle a traversé les siècles et domine la cérémonie du pastrage*(8) sans que l’on en connaisse véritablement l’origine, au-delà de son importance dans la vie sociale.
Rappelons que l’importance des bergers fut magnifiée par le christianisme qui leur accorda la primauté du message de la Nativité et la connaissance des routes convergeant vers la Crèche par la lecture du chemin d’étoiles, une science inconnue des savants des villes et des rois de la terre (qui arrivèrent en retard pour l’hommage à l’Enfant).
Fouiller la mémoire collective nous emmène encore plus loin. Lors de la mise en route de l’abeiller, les pâtres incitaient les béliers géniteurs à prendre la tête du troupeau pour le guider au cri de : Aqué… Aqué menoun*(9) ! Frédéric Mistral rapprocha le vocable du mot grec hégoumène. Ce grand érudit, retrouvait dans cette incitation la racine ancienne de monos (premier), associée au nom du chef suprême, Agamemnon, ce qui signifierait : « Allons, les meneurs ! ».
La tradition des messes de minuit provençales de l’ancien temps incluait la cérémonie de « l’offerte » par laquelle se faisait l’offrande d’un petit agneau (l’Agneau de Dieu, symbole de la Rédemption), couché dans un char enrubanné tiré par une brebis, entouré d’un cortège de jeunes filles vêtues de blanc portant des fleurs et des fruits.
Il y a quelques années, on pouvait encore voir l’entrée des personnages vivants du cortège des Rois Mages à Aix en Provence, dans la cathédrale Saint-Sauveur, ainsi que la cérémonie de l’offerte aux Baux de Provence, à Maillane et à l’abbaye de Frigolet, avec les noueuses* et les tondeurs armés de leurs forces*(10).
Un curieux symbole, dont l’origine se perd dans la nuit des temps des bergers d’Afrique, est imprimé dans la laine du flocal : le bélier de tête. Aucune géomancie moderne n’est en mesure de l’expliquer mais il s’est transmis aux bergers de Provence, de génération en génération, jusqu’au milieu du XX° siècle, voire à nos jours. Il consiste à réserver sur le dos de l’animal, lors de la tonte, trois longues floques, ou laisses, sorte de longues mèches de laine qui désignent celui qui a le privilège d’ouvrir la voie.
Il est troublant de constater que ce symbole subsiste chez les populations nomades d’Afrique, chez les bergers arabes, bédouins et berbères qui l’alignent par une droite sur l’échine de l’animal en quatre points précis : la croupe, les reins, les épaules et la nuque.
Quatre points alignés désignent la Voie, la Via, la route (en arabe : el Tharîq).
Ils témoignent de l’importance des symboles d’origine africaine dans l’histoire millénaire de la vie pastorale.
Mémoires ancestrales, mémoires antiques…
*(1) Drailles : passages naturels sur des strates rocheuses plates.
*(2) Abeiller : grand convoi, grand troupeau.
*(3) Bayle : chef-berger.
*(4) Robe : organisation administrative.
*(5) Mounta, devala : montée à l’alpage, descente de l’alpage (la transhumance).
*(6) Nourriguiers : propriétaires de troupeaux (appelés aussi capitalistes).
*(7) Limousino de cadis : manteau de bure.
*(8) Pastrage : Nativité des bergers.
*(9) Aqué menoun : (venez) ici, les meneurs !
*(10) Noueuses, forces : les noueuses roulaient la laine en ballot. Les forces : cisailles de tonte.
Selon la tradition provençale,
Les membres du bureau et le Président de Tourrettes Héritage vous souhaitent :
Bon bou d’an e a l’an qué vèn. Diéu nous fague la gràci de vèire l’an que vèn e se noun sian pas mai, qué noun fuguen pas mens !
Bonne fin d’année et à l’an prochain. Dieu nous fasse la grâce de voir l’an prochain et si nous ne sommes pas davantage que nous ne soyons pas moins nombreux !
Portrait de Dante (1465), Domenico di Michelino, cathédrale Santa Maria del Fiore, Florence (détail).
LES AFFRES DE LA BIEN-PENSANCE OCCIDENTALE
Gérard Saccoccini
Si l’information est vérifiée, la déclaration du secrétaire d’Etat belge, en charge de l’urbanisme et du patrimoine, le fait caracoler en tête du peloton dans la course à la bêtise, en ce qui concerne le projet de révision de l’appellation « Journées du Patrimoine » qu’il propose de remplacer par « Heritage Day ».
Ceci au motif que le vocable « patrimoine » fait étymologiquement référence à une sujétion à l’autorité du pater familias qui serait réductrice pour la femme !
Quelle merveilleuse idée que d’utiliser une locution anglaise dans un pays qui possède déjà trois langues officielles ! A noter toutefois que le mot anglais « heritage » se traduit en français par patrimoine, ce qui rend obsolète la tentative de supprimer la référence à la transmission patriarcale,
Par ailleurs, il semble que le groupe d’influence proche du ministre Néerlandais en charge de l’éducation nationale soit en passe de coiffer au poteau le ministre belge (ils se donnent les moyens d’y parvenir) avec les récentes « retraductions » de l’œuvre de Dante Alighieri et un projet de retrait des programmes scolaires des Pays-Bas, au motif que la Divine Comédie contient des propos offensants pour les musulmans.
Qu’en est-il exactement ?
Parmi les personnages que Dante place dans l’Enfer apparaissent, entre autres, Averroès, commentateur de l’œuvre d’Aristote dont la doctrine fut condamnée non seulement par l’Eglise, mais aussi par l’orthodoxie musulmane, puis Avicenne, auteur du traité de médecine « le Canon » (chant IV), non moins condamné, et enfin Mahomet et son gendre Ali, considérés comme schismatiques et placés près de Lucifer, dans le 8ème cercle de l’Enfer (chant XXVIII), pour la gravité de leurs péchés.
Quels sont-ils ?
La faute reprochée à Mahomet est d’avoir divisé les peuples de la Méditerranée en créant l’hérésie musulmane et en provoquant un schisme majeur entre chrétiens et musulmans (ce qui historiquement est vrai). Cette division est inconcevable pour Dante pour qui l’humanité doit être unie dans la foi chrétienne au sein d’une Eglise souveraine, ce qui est un concept philosophique inhérent à la pensée de la société du siècle, encore imprégnée de celle de Saint François d’Assise. La légende de ce saint personnage, inscrite dans la mémoire collective par un écrit anonyme du XIV° siècle, les Fioretti, perpétue son amour et son respect affirmé de la création et des êtres vivants. Sans doute son esprit d’humilité et sa volonté d’absolue pauvreté lui furent il inculqués par la philosophie tolérante enseignée par sa mère, une certaine Dame Pica venue de France, dont le legs régénéra l’Eglise.
Quant à Ali, en créant le schisme entre sunnites et chiites, il s’est rendu coupable d’hérésie mineure (ce qui est une autre vérité historique). Rappelons qu’à la mort de Mahomet, en 632, aucun successeur n’avait été clairement désigné, ce qui déclencha les querelles entre ceux qui se considéraient ses héritiers. Une dispute qui donna lieu au grand schisme de l’islam par la constitution de deux factions dont l’antagonisme déchira les sunnites et les chiites
Ces pensées correspondent à une philosophie sociétale du début du 14ème siècle ! Et ce serait une bien plus grande hérésie, et une faute incommensurable, que de vouloir analyser une œuvre du passé à l’aune des concepts du présent, en prenant le risque inconsidéré d’une réécriture déviante de l’Histoire, d’une fausse histoire donc, inquiétante, porteuse de dérives et d’amalgames. Car c’est bien là que le bât blesse.
Les diktats d’une nouvelle culture de l’effacement, du renoncement, la culture « wok », la fameuse « cancel culture », qui gangrènent nos universités et nos grandes écoles, de plus en plus intolérants et agressifs ont profondément noyauté les sociétés occidentales dans lesquelles le « politiquement correct » et la pensée unique instaurent une véritable dictature idéologique intellectuelle qui ne souffre aucune contestation et ne tolère aucun débat d’idées. Cet état de choses conduit aux débordements condamnables que génère l’expression d’une pensée différente, ou contradictoire, à laquelle répondent la grossièreté, l’invective, l’insulte et jusqu’à l’agression physique, aujourd’hui hélas banalisée.
On n’est pas libre lorsqu’on n’est pas maître de soi, disait avec justesse Démophile.
Dans le cas présent, les attitudes qui conduisent à interpréter, voire interdire l’œuvre de Dante, amèneront inévitablement à expurger (donc dénaturer et pourquoi pas interdire) les œuvres de Voltaire et de Céline. Ces comportements représentent un véritable danger pour la société humaine.
Et puis quelle curieuse tendance, quel curieux snobisme « culturel » pousse les gens à utiliser des mots tirés de langages étrangers, dont les racines sont certes communes, alors que la richesse de la langue française n’incite pas à rechercher dans ces langages des mots que nous ne possèderions pas.
D’autant plus que la prononciation à la française les déforme, les dévoie, et les rend souvent incompréhensible par absence de respect de la position syllabique d’un accent tonique dont nous n’avons pas l’utilisation.
C’est le cas du vocable italien « mercato », dans le football, à la place du français « marché » (sans doute dépourvu d’élégance). Prononcé à la française, sans respect de l’accent tonique, l’effet produit sur les locuteurs de la langue italienne est ridicule et il écorche l’oreille des latinistes.
Dans la même veine, un de nos distingués politiques, a trouvé judicieux d’utiliser un mot espagnol « remontada » pour qualifier son retour dans l’arène. Là encore, la prononciation française produit un effet curieux, surprenant pour les locuteurs espagnols qui ne l’identifient pas de prime abord, car l’accent tonique se place sur la troisième syllabe du mot (et non pas sur la dernière, selon l’usage français).
Mais que signifie « remontada » ? La traduction littérale nous donne « remontée » en français. Si ce vocable pouvait paraître trop trivial (on pouvait l’associer à « bretelles »), n’y avait-il pas une traduction élégante, sensible, adaptée, comme « renouveau », ou « renaissance », permettant de le remplacer en évitant le ridicule d’une mauvaise prononciation ?
Lequel ridicule ne tue plus depuis bien longtemps.
Et je ne puis m’empêcher de rendre hommage à un amoureux inconditionnel de la langue française, le verbicruciste qui fit les beaux jours des Jeux télévisés, « Maître Capelo » : Jacques Capelovici, dont le nom était devenu le trope qualifiant l’expert en grammaire, farouche opposant à la montée du franglais et aux rectifications orthographiques du français des années 1990.
15 Octobre 2021
« Antivax » : l'histoire mouvementée de la vaccination depuis trois siècles
Quand la technique de la variolisation – qui consiste à inoculer le virus de la variole – apparaît en Europe dans la première moitié du XVIIIe siècle, sur quels fondements est-elle décriée ?
Il y a tout d'abord des arguments culturels : comme c’est une femme, Lady Montagu, qui a importé d’Orient cette pratique, certains disent « ce sont des remèdes de bonnes femmes », « ce n’est pas de la vraie médecine », ou encore « ça ne marchera pas sous notre climat ».
L’argument religieux, ensuite, est hostile à l’idée qu’on puisse modifier le destin que Dieu a prévu pour nous. Cela dit, cet argument est restreint – certains théologiens rétorquent en substance : « si Dieu nous a permis de trouver un moyen de nous prémunir contre cette terrible maladie, utilisons-le ! ».
Sur le plan scientifique, il faut bien avoir à l'esprit que, jusqu’à la fin du XIXe siècle, on ne sait pas comment le système immunitaire fonctionne. Cette pratique arrive, certains affirment qu’elle marche, mais on n'a aucune théorie médicale satisfaisante pour en rendre compte. C’est purement empirique.
Le débat s’installe donc sur son efficacité et sur son éventuelle dangerosité. L’efficacité semble démontrée rapidement. Quant à la dangerosité, elle est réelle car on inocule le vrai virus de la variole, atténué par des moyens naturels : le virus, présent dans pus séché, est exposé à l’air donc comme assommé, puis on le fait pénétrer par une incision sur la peau, ce qui déclenche une réaction primaire qui fait que le virus est moins dangereux, mais reste contagieux.
Le débat est assez riche au XVIIIe siècle, il porte sur ce qu’on va appeler plus tard la balance bénéfice-risque, et sur la part de responsabilité individuelle et collective.
En quoi l’épisode fondateur de l'invention de la vaccine de Jenner en 1796 est-il emblématique, à la fois de l'enthousiasme, mais aussi de la défiance envers la vaccination ?
Avec l’invention de Jenner, la pratique change, on n'utilise plus le virus de la variole, mais un virus cousin, qui est le virus d’une maladie bovine, qu’on va appeler la vaccine – d'où le nom de vaccin.
Jenner, médecin de campagne du Gloucestershire, en Angleterre, découvre que les personnes qui traient les vaches sont très rarement malades de la variole humaine, notamment quand elles sont confrontées à cette variole bovine.
Cette vaccine est très intéressante car très bien immunisante, les virus sont suffisamment proches pour que la réponse immunitaire soit efficace contre la variole humaine. Et d’autre part ce n'est pas contagieux, ce qui est une grosse différence avec l’inoculation.
Les difficultés autour de ce procédé, c’est d’abord que la maladie bovine est trop rare pour qu'on puisse exploiter le pus des vaches, donc il faut repasser par le pus humain, prélever de la lymphe sur des enfants préalablement vaccinés, qui vont servir de réserves de vaccin. C’est ce qu’on appelle la technique de bras à bras. Le problème c'est qu’on communique toujours un peu de sang ou de lymphe d’un sujet à l’autre. Si un enfant est malade de la syphilis par exemple, on risque de la transmettre d’un enfant à l’autre.
Les États s’engagent néanmoins très rapidement dans des campagnes de vaccination, notamment dans l’armée, auprès du personnel d’État, etc. Mais Jenner reste une figure contestée.
C’est à ce moment-là, à partir de l’époque Jenner, qu'on voit émerger le courant « antivax » principalement représenté par des médecins. Les arguments forgés à la charnière des XVIIIe et XIXe siècles contre la vaccination se retrouvent ensuite à toutes les époques.
Dans un premier temps, ce sont les médecins qui refusent de croire à l’efficacité ou à la non dangerosité de la vaccine, des médecins d’ailleurs qui étaient favorables à l’inoculation – on aurait tendance aujourd'hui à mettre les deux procédés dans le même sac, mais à cette époque, une partie de ceux qui avaient accepté l’inoculation se retournent contre la vaccination, parce qu’on importe une maladie bovine qu’on communique à l’homme, ce qui implique toute une série de tabous.
En Angleterre, premier pays à imposer la vaccination au milieu du XIXe, comment les opposants au tout nouveau vaccin contre la variole se sont-ils mobilisés ?
Dans les années 1830, l’Angleterre se dote d’un certain nombre de lois pour gérer l’industrialisation et le développement de la pauvreté urbaine. À partir de 1853, dans tous les lieux de type poorhouses et workhouses, ces établissements d’assistance aux pauvres, la vaccination est obligatoire.
L’antivaccination, qui jusque-là était interne au milieu médical, devient un mouvement populaire, avec des arguments civiques : l’État ne doit pas imposer la vaccination comme une sorte de chantage à l’assistance.
C’est la particularité de l’Angleterre : on voit apparaître des manifestations de masse dans les régions de grosses industries. La capitale de l’antivacccinisme, c’est Leicester, où est organisée une grande manifestation en 1885.
En France, quand naît le mouvement antivaccination ?
La France fait une première tentative de législation contraignante de vaccination contre la variole en en 1881, mais le projet est rejeté par le Sénat.
Tant qu'il n’y a pas de vaccination obligatoire, jusqu’en 1902, il n’y a pas de mouvement populaire. En revanche, l’opinion anti vaccin s’exprime dans la presse de manière importante. Cela se déclenche après la Commune en 1871 pour deux raisons : la guerre a montré que certaines populations continuaient à être vulnérables, notamment chez les Allemands, où les populations civiles n’étaient pas bien protégées. Et, surtout, dans les années 1870, il y a une très grosse pandémie mondiale.
Tous les États occidentaux décident que, désormais, il faut prendre des mesures coercitives.
En France, après la Commune, lorsque la IIIe République s’instaure et soutient nettement les recherches de Louis Pasteur (au départ conservateur bonapartiste, mais qui survit à la fin de l’Empire et est adulé par nouveaux dirigeants de la III République), une partie de ceux qui s’opposent au régime vont mener une véritable campagne de presse contre Pasteur et contre la vaccination.
Les journaux de Henri Rochefort, L'Intransigeant et La Lanterne, en sont les principaux relais. Il laisse tribune ouverte et écrit lui-même des articles contre Pasteur, qu'il accuse de chercher le profit. C’est le début de l’argument anti Big Pharma.
Il y a aussi à cette époque l’utilisation des images et des photos aussi : en Angleterre, se constitue une banque de photos de malades, d’accidents post vaccinaux. Il y a notamment un album terrifiant publié en 1906, l’album des bébés morts, photographiés dans leurs cercueils, avec écrit en dessous « vacciné tel jour, mort tel jour ».
Cette utilisation de l’image et de la caricature est très précoce et efficace. On retrouve d’ailleurs ces images dans des ouvrages ou des blogs aux XXe et XXIe siècles.
Pour de bonnes et de mauvaises raisons, à chaque fois que l’État a cherché à instaurer une loi d’obligation vaccinale, il a étendu la contestation. De fait, c’est le seul médicament qu’on vous force à prendre, c’est très particulier. La politique vaccinale est une politique d’État, de troupeau : les raisons pour lesquelles il faut se vacciner ne sont pertinentes qu’à l’échelle du groupe. Il y a là-dedans quelque chose qui heurte la sensibilité du citoyen moderne.
Pendant les XIXe et XXe siècles, la conception organiste de la société faisait que le citoyen acceptait en masse de répondre aux injonctions de l’État. Mais dans le monde post 68, le rapport à l'autorité n’est plus le même, la société est individualisée, et donc la politique vaccinale est de plus en plus contestée.
L’État a aussi menti dans le domaine de la vaccination, comme dans les autres domaines : les statistiques ont été arrangées. Il y avait un problème de transparence et une part de cynisme : certains responsables politiques disaient très concrètement : on sait qu’il y a des problèmes et des accidents, mais il ne faut surtout pas le dire, les populations pourraient perdre confiance. C’est une conception paternaliste de l’État, qui a été la norme pendant longtemps.
Ceci dit, outre cette part de responsabilité directe de l’État qui a cherché à dissimuler, ce qu’il faut voir surtout, c’est l’incompatibilité entre les droits individuels et la politique vaccinale.
Cela fait partie de ces lois qui sont des contraintes fortes
vis à vis de l’individu, et plus il est enclin à penser qu’il a son libre arbitre, plus c’est dur pour lui d'accepter cette contrainte.
Ceux qui refusent le vaccin s'inscrivent-ils dans un mouvement de désobéissance civile ?
Les Antivax le défendent en tout cas : ils disent on n’est pas antivaccin, on est vaccinsceptique, sceptique à l’égard des politiques d’État et des industries pharmaceutiques qui fabriquent ces vaccins.
On n’est pas obligé de les croire sur parole mais tout ce débat, au demeurant, est légitime dans le cadre d’une démocratie sanitaire. Il ne s’agit pas tant de discourir sur l’efficacité ou la non dangerosité des vaccins, qui sont bien démontrées en général, mais sur les conditions dans lesquelles on applique la recommandation vaccinale en particulier.
réf :Retronews 01/10/2021 Laurent-Henri Vignaud
Musée International de la Parfumerie de Grasse. Reconstitution d'une boutique d'apothicaire, salle Moyen Âge
15 Juillet 2021
HISTOIRE DU PARFUM (1)
Gérard
Saccoccini
A l’aube des grandes civilisations, à Sumer, en Égypte,
en Chine ou en Inde, comme chez les Étrusques, les Grecs et les Romains, s’ouvre le parcours initiatique complexe qui, depuis l’aromathérapie jusqu’à l’herboristerie, en passant par l’alchimie, conduit au
parfum.
Il est établi que l’usage des plantes aromatiques et « épices » remonte à la plus haute antiquité et que leur emploi semble, de prime abord, avoir été réservé aux cultes, peut - être parce que leurs senteurs étaient sensées devoir plaire aux dieux, mais plus vraisemblablement parce que les sucs, les sèves et les extraits des premières plantes aromatiques connues servirent à l’embaumement des défunts et à la conservation des corps.
La préparation des onguents et des fards, ainsi que l’assemblage des fragrances naturelles, fixées dans des boulettes de cire, avait lieu dans les temples et resta longtemps un secret d’initiés que ceux-ci livrèrent plus tard, à prix d’or, aux particuliers.
Modestes plantes de nos campagnes ou flore exotique des lointains pays de l’Orient mystérieux, les herbes nanties de leurs vertus médicinales, fraîches, fanées ou séchées, entrèrent dans une pharmacopée savante utilisant, pour la santé de l’homme, dans le secret des officines « d’espiciers » et apothicaires, les confections de concrètes, d’huiles essentielles, de résinoïdes et d’onguents.
L’incessante quête de nouveauté, dans la parure féminine, poussa l’homme vers une fascinante recherche pour arracher aux plantes leur âme odorante, cette essence suprême appelée huile éthérique ! Ainsi prenait corps, peu à peu, la naissance de l’industrie du parfum.
Avant que de conquérir l’univers du « Parfum », savamment dosés, harmonieusement mêlés, les « aromates » entrèrent dans de savantes compositions pour flatter tant le palais que les sensations olfactives, élevant la préparation des mets à l’apogée de la perfection par leur relief et leur noblesse.
Espiciers du temps jadis, apothicaires et pharmaciens avec « leurs pères et bons maîtres » médecins, anysetiers et autres gantiers parfumeurs (devenus parfumeurs par lettre patente royale) sont les héritiers de la « science des herbes du soleil ».
LE PARFUM EN PAYS DE FAYENCE
A la fin du XIX° s., dans le canton de Fayence, le phylloxera détruisit le vignoble. Peu de temps auparavant, le village de Seillans avait été dévasté par le choléra. Pour lui redonner vie, la vicomtesse Charlotte Savigny de Moncorps, conseillée par des amis parfumeurs grassois, décida de consacrer les terres qu’elle possédait entre Callian et Comps aux cultures florales. Elle fut la pionnière de la déclinaison du parfum sur toute une gamme de produits de beauté et de soins du corps qui connurent un succès immédiat et firent la renommée internationale du village de Seillans.
Charlotte, Jeanne, Marie de Villers-La Faye, est née sans doute en 1848 (?). Elle avait épousé, en secondes noces le marquis de Rostaing possédant de grands domaines sur le terroir de Seillans. En 1870, l’épidémie de choléra décima le village, la marquise perdit son mari et garda les terres.
Remariée au vicomte René Savigny de Moncorps, elle constatait au retour d’un voyage aux Indes la profonde misère d’un terroir dévasté par le phylloxéra qui avait détruit le vignoble, pilier de l’économie locale.
Conseillée par un ami, parfumeur de Grasse, elle dédia ses domaines aux cultures de plantes à parfum. Ses terres, étendues jusqu’au territoire de Callian et de Comps furent plantées de 140 000 pieds de jasmin, 45 000 plants de violettes et 10 000 rosiers de mai.
Très vite, employant la main d’œuvre rurale locale disponible, elle décida de gérer elle-même la transformation des fleurs récoltées dans une parfumerie qu’elle créa dans le village, et compléta ses plantations par de l’iris (dont la délicate extraction de l’huile est restée une spécialité du pays de Grasse encore aujourd’hui), des lavandes, de la menthe et des plants de géranium largement utilisé pour ses propriétés de fixateur olfactif.
En 1883, les premières récoltes furent conduites avec succès jusqu’au processus d’enfleurage qui mobilisa la main d’œuvre féminine du village.
Première femme à recevoir la Médaille du Mérite Agricole pour la mise en œuvre de toutes nouvelles techniques d’arrosage, la vicomtesse fut aussi une femme d’affaire avisée : la fragrance nommée « Parfum de Seillans » était commercialisé, puis déclinée en de nombreux produits : eaux de toilettes, crèmes de beauté, savon et « poudres de riz », que l’on pouvait trouver dans les boutiques des magasins « à rayons multiples » des grandes villes, jusqu’à New York.
Elle reçut souvent chez elle Alphonse Karr, son ami, Guy de Maupassant aux attaches grassoises en la personne du député Jean Ossola, son neveu par alliance, le poète Jean Aicard et jusqu’à la reine Victoria d’Angleterre venue visiter Grasse en 1891.
Pendant le conflit de la première Guerre Mondiale, elle transforma son établissement en hôpital de campagne. A la fin des hostilités, les machines abandonnées à l’extérieur étaient inopérantes, rouillées ou obsolètes et la vicomtesse atteignait les 80 ans. Elle vendit son exploitation qui connut un nouvel essor avec le pharmacien de Seillans, François Chauvet, lequel conféra à l’entreprise un rayonnement mondial : certains anciens du village se souviennent encore des visites de Guerlain, le grand parfumeur qui venait en personne choisir ses distillats, ses essences et ses produits aromatiques.
LES ORIGINES DE LA PARFUMERIE
Apothicaires et espiciers (appelés à Florence medici e speziali), gantiers-parfumeurs, herboristes et anysetiers, tous, à un moment ou à un autre de l’exercice de leur métier, ont eu un lien commun : l’héritage médiéval de la connaissance de l’alchimie. Le rêve d’obtenir de l’or par la transmutation des métaux vulgaires enfiévra les imaginations et donna de l’alchimiste une image complètement faussée.
Son activité s’étendait au traitement du verre, des perles, des pierres précieuses, à la distillation des parfums et des alcools (de l’arabe Al-Kohol), à la constitution d’une pharmacopée complexe, à la fabrication des onguents, des poudres et des fards et à la teinture des étoffes.
Le Traité des Aluns et des Sels, attribué au médecin Ibn Ràzi (1), a marqué au plus haut point toute une alchimie omniprésente au Moyen-Age.
Aux XIe et XIIe siècles, par les Croisades et par les compagnons de retour d’Orient d’une part, et au travers de la pensée arabe diffusée par l’université de Tolède d’autre part, des groupes d’alchimistes purent répandre leur savoir au travers des réseaux complexes du compagnonnage et des passerelles de grand commerce, développant une science de connaissance esthétique de la matière !
Depuis l’origine des temps l’homme s’est interrogé sur les fondements de son existence. La science, au terme d’un long et patient cheminement déductif de la pensée raisonnée, a tenté de répondre à ses questions et, devant ces mêmes interrogations sont nées les religions. Aux prémices des temps historiques, des textes mystérieux semblèrent révéler une autre forme de connaissance, comme un élément d’équilibre entre physique et métaphysique, entre certitude et foi.
Couchés sur des parchemins, des tablettes, des papyrus, ces textes étranges apparurent simultanément de l’Orient à l’Occident, parlant de spiritualisation de la matière et de matérialisation de l’esprit.
Ce qui est curieux, c’est le caractère réduit au minimum de l’écriture, sur ces grimoires et supports divers, au profit d’un graphisme visuel fortement symbolique, comme si le « message », dès son origine, se voilait de mystère au sein d’un livre « muet ». Tablettes de Mésopotamie, textes védiques et papyrus d’Égypte sont les plus anciens traités alchimiques connus et déchiffrés, mentionnant un fluide (dit hataka en védique) capable de changer le bronze en or pur !
De par son caractère universaliste, l’alchimie traita toutes les matières et par conséquent se trouva à l’origine de la naissance de l’aromathérapie et de la médecine. Pouvons-nous encore continuer de penser que les efforts et les veilles laborieuses des alchimistes n’eurent pour but que la recherche de quelques formules permettant de fabriquer de l’or ?
AROMATHÉRAPIE - HERBORISTERIE
L’Aromathérapie est la science de l’utilisation des huiles essentielles aromatiques, extraites des plantes, dont les vertus curatives furent découvertes par une longue et minutieuse observation des comportements du monde animal. Produits huileux, volatiles, odorants seront extraits par distillation au moyen de l’instrument le plus ancien connu, l’alambic, puis utilisés par les alchimistes du Moyen Age pour leur vertus antiseptiques, diurétiques, carminatives et antispasmodiques.
Médecins et chirurgiens barbiers de la Renaissance les utiliseront largement, sans pouvoir toutefois en expliquer scientifiquement l’action, ce qui leur vaudra défiance, suspicion et quelques bonnes accusations de pratique de la sorcellerie.
Connus depuis la nuit des temps, ces extraits de plantes servaient à l’embaumement des corps dans l’ancienne Egypte et, selon l’importance et le rang social du défunt, la somme et la richesse des produits utilisés allaient croissant, pour atteindre le summum dans la cérémonie d’embaumement du corps des pharaons. Sumériens, Hittites, Grecs et Romains utilisèrent largement les huiles essentielles dans les rituels funéraires, le culte, la purification, l’hygiène corporelle et les jeux.
L’Herboristerie
relève de l’art des « espiciers » du Moyen-Age, venus s’installer près des grands ports commerçant avec l’Orient. Des membres de cette corporation s’établirent au XIe
s. à Montpellier dont le nom latin : Mons Pistillarius désigna le lieu où se concentraient les échoppes des espiciers. Instruits des pouvoirs des plantes aromatiques, ils sont à l’origine
de la connaissance et de la vulgarisation des vertus curatives des plantes médicinales. Réservées aux cultes religieux, et parfois au seul usage d’un personnage (le basilic !), les plantes répertoriées,
classées, constituèrent la base d’une pharmacopée traditionnelle, souvent familiale et dite « de grand’mère », qui produisit une foule de tisanes et décoctions salutaires, savamment préparées
et dosées par l’herboriste (aujourd’hui disparu) dont la pratique reposait sur de solides et antiques connaissances léguées par ces « espiciers », à l’origine du métier d’apothicaire,
de la pharmacie moderne et de la fondation de la faculté de médecine de Montpellier. Ceci nous indique bien que le détenteur du secret des herbes, prêtre ou laïc, quelle que soit l’époque, fut toujours
respecté et honoré.
15 Août 2021
HISTOIRE DU PARFUM (2)
APOTHICAIRES & PARFUMEURS
Gérard Saccoccini
Les Apothicaires
Au VIe siècle, Aétius d’Amide, médecin byzantin né en Mésopotamie, résume les connaissances acquises par les Anciens dans l’étude des végétaux. Il établit la première distinction entre les herbes « Botan » et les légumes « Laganon ». Son traité d’herboristerie en 16 livres guidera le minutieux travail des moines apothicaires des monastères orientaux et fera que les herbes aromatiques, soigneusement répertoriées et classées, seront mieux connues.
En Occident, sous l’influence des grands ordres monastiques (Cluny, Cîteaux), princes, papes, rois et riches bourgeois vont s’intéresser à leur culture et à leur consommation. L’extraordinaire foisonnement des métiers et la diversité des corporations du Moyen Âge vont introduire des éléments de confusion dans l’attribution des tâches, l’exercice de la profession et l’attribution des privilèges. Cet état de choses requerra souvent l’intervention du pouvoir royal.
La fonction d’apothicaire naquit vraisemblablement, ainsi que le nom, dans ces premiers monastères bénédictins dans lesquels cette charge donna lieu à des études très poussées, ce qui explique le grand nombre de laboratoires alchimiques au sein même des communautés monastiques.
Les moines eux-mêmes, fin lettrés, férus de textes anciens, s’activaient aux expériences et aux recherches et réalisaient des décoctions de salsepareille, millepertuis et armoise aux vertus sudoripares qu’ils associaient pour lutter contre la malaria (désignée sous le vocable de fièvres paludéennes) ! On peut imaginer que la potion était souveraine car il n’y a pas de relation de moines morts de la malaria, alors que beaucoup d’entre eux travaillaient à l’assèchement des marais pour bonifier les terres.
Au XIIe s. naquit la corporation des poivriers-souverains, en liaison avec les espiciers de Montpellier. Les anysetiers du roy, corporation spécialisée dans le traitement de l’anis et de l’extraction de ses essences, possédait ses traditions, son protocole et ses armoiries ! A Paris, depuis 1250, les espiciers-apothicaires détenaient le monopole du cumin, du fenouil, de l’anis et des épices. Au-dessous d’eux, les pébriciers ne pouvaient vendre que du poivre ! Dans l’échelle professionnelle, tout en bas de la pyramide se trouvaient les regrattiers, simples revendeurs détaillants de rues ou de foires. Sous le vocable « Apothica » s’ouvrirent nombre d’échoppes qui ne vendaient pas que des drogues, mais des aromates, des épices, des « philtres » et des liqueurs. Là encore, le pouvoir royal interviendra souvent pour limiter les débordements et les abus.
Le 22 mai 1336, une déclaration de Philippe VI réglemente le serment des apothicaires et de leurs valets, ainsi que la tenue de l’herbier.
En 1353, les espiciers-apothicaires s’érigent en corporation souveraine et vendent aussi bien aux médecins qu’aux cuisiniers et, de cette époque, date la coutume d’offrir des aromates aux magistrats (Louis XI freina cet abus) qui perdura jusqu'à la Révolution à titre de privilège des gens de robe. L’ordonnance du 27 août 1790 y mit définitivement un terme. Il faudra attendre 1778 pour que la Faculté de Paris décerne le premier diplôme d’herboriste.
Charles VIII, au XVe s., réunit le corps des espiciers aux apothicaires, et leur permet de s’immiscer dans la pratique
pharmaceutique. Les uns, comme les autres, reconnaissaient les médecins comme « leurs pères et bons maîtres ». Cet état de rigueur pèsera 146 ans sur
le corps des pharmaciens.
Les Parfumeurs
Le mot " parfum " est un dérivé du mot latin " parfumare " signifiant " à travers la fumée ". A l’aube des grandes civilisations, en Egypte, à Sumer, en Chine ou en Inde, comme chez les Etrusques, les Grecs et les Romains, le parfum est présent et ses substances odorantes sont utilisées autant pour les rites religieux que pour les plaisirs de la vie quotidienne et le rituel de la toilette et du maquillage.
De tous temps, la fabrication des flacons fut extrêmement soignée, décorée d’images mythologiques, de scènes empruntées à la vie de tous les jours, mais aussi de formes amusantes, symboliques et toujours attractives dans des aryballes et alabastres déclinés en tailles dégressives.
Les belles Étrusques utilisaient de petites boules de cire enfermant des pétales broyés, que l’on tressait avec les cheveux. La fragilité de ses odeurs fugitives donna à l’homme l’idée de faire bouillir les herbes, écorces odoriférantes et fleurs pour exprimer les sucs parfumés,et un long travail d’analyse où l’empirisme tient une place de choix va amener l’homme à la découverte de l’alambic, au travail en vase clos et au procédé de récupération de l’huile essentielle.
Ce processus subtil de recherche de la perfection dans l’extraction des sucs odorants fut atteint en Egypte, depuis les hautes dynasties, et amené à son point de perfection sous les Ptolémées.
Les conquérants arabes qui donnèrent à l’Egypte le nom de Kymi - Terre noire
- furent tellement subjugués par la perfection du procédé qu’ils le désignèrent du nom de Al Kymi, terme à l’origine du mot alchimie.
LE PARFUM EN OCCIDENT
Au Moyen Age, les senteurs diffuses, discrètes, à dominante douce, semble avoir recueilli la faveur d’une société qui découvre, par le retour des croisades, à côté d’un nouvel et subtil art de vivre, l’usage des bains, l’hygiène corporelle, les plaisirs raffinés des massages, les boules de savon arabe et les eaux parfumées (eau de rose notamment). Si l’Antiquité connaît l’alambic, on ignorera la fabrication de l’alcool vraisemblablement jusqu’au VIIIe s.
Début XIVe siècle, les appareils de distillations font leur apparition et vont permettre l'obtention des Quintae essentiae. A cette époque, seule l'huile de térébenthine représente une huile essentielle.
La mise à sac par les Ottomans, en 1453, de la cité la plus somptueuse du monde, Constantinople, consacre sa perte définitive et amène à Venise une multitude d’artisans des senteurs. C’est là que va naître la parfumerie moderne aux prémices du XVIe siècle.De par ses contacts fructueux et répétés avec les Flandres et l’Allemagne, Venise attire une multitude de savants et botanistes qui accompagnent les riches marchands. Travaillant avec les ingénieurs vénitiens, ils augmentent le nombre d’huiles essentielles extraites par distillation, améliorent l’alambic et s’oriente vers une parfumerie de laboratoire dans laquelle les alcools sont prédominants.
En Égypte, aux premiers siècles avant et après J.C., on trouvait à Alexandrie une importante corporation de parfumeurs qui distillaient élixirs et essences florales en utilisant des alambics (ambikos).
Un manuscrit du 4e siècle, écrit par un alchimiste alexandrin Zossime de Panopolis, présentait l’illustration d'un alambic. Ramenés à Venise, les grimoires poussiéreux remplis de comptes rendus d’expérimentations et de recherches fiévreuses, constituèrent le précieux butin disséminé dans les monastères
15 Septembre 2021
HISTOIRE DU PARFUM (3)
Le PARFUM à la RENAISSANCE
ou le PARFUM à la MODE d’Italie
Gérard Saccoccini
Après les affres de la Guerre de Cent ans, l'art de la parfumerie va se développer par l'entremise des villes italiennes depuis longtemps importatrices des senteurs orientales. Par contre les ablutions et les bains, jugés contraires à la morale religieuse (et à l'hygiène selon Ambroise Paré, à cause de la propagation des épidémies par la concentration des personnes dans les bains publics) furent abandonnés.
C'est tout naturellement à Venise, vers 1555, que fut rédigé le premier traité européen de parfumerie. La mode italienne par l'entremise de Catherine de Médicis introduisit en France le gant parfumé (on retrouvait là l'association médiévale des deux métiers). Les « peaux d'Espagne » imprégnées de senteurs voyageaient jusqu'en Angleterre.
Premier centre commercial européen, tant au Moyen-Age qu'au début de la Renaissance, Venise est aussi la première ville où marchandises importées et goûts raffinés font leur apparition.
Un observateur notait qu'à Venise, « tout n'était que senteurs, gants, chaussures, bas, chemises, et même les pièces de monnaie. Et comme si cela ne suffisait pas, on conservait sur soi des objets faits en pâte odorante et on tenait des couronnes d'ambre gris dans ses mains ».
Mais Venise n'est pas le seul lieu où l'on se préoccupe de parfums : dans toutes les villes italiennes, la noblesse se passionnera pour les senteurs. Les plus célèbres représentantes de la Renaissance italienne, Isabella d'Este, Caterina Sforza et Isabella Cortese, publient leurs recettes de fragrances. Les femmes portent des globes percés en argent contenant de l'ambre gris ou du musc. Ces globes portent le nom de « pomanders », qui vient du français « pommes d'ambre ».
A la cour de Ludovic le More, Leonardo da Vinci poursuit diverses expériences à base d'infusions de fleurs et d'herbes dans l'alcool, ou « acquarzente ». Il tente aussi l'enfleurage de fleurs d'oranger dans des amandes afin que l'huile d'amande s'imprègne d'une senteur florale.
L'introduction des orangers, jasmins et rosiers en Europe est une autre conséquence du commerce avec l'Orient. L'eau de rose connaît, en Italie, une popularité semblable à celle qu'elle avait en Perse. Jusqu'à ce que l'emploi du couteau et de la fourchette se généralise à la fin du XVIIe siècle, les convives se lavent les mains à l'eau de rose, et pas seulement en Italie. Celle-ci, comme d'autres parfums, est fabriquée dans les monastères.A Florence, la pharmacie du monastère Santa Maria Novella fournit la famille Médicis en essences florales (elle est encore en activité aujourd’hui).
Le XVIe siècle voit aussi la publication de nombreux ouvrages sur les plantes, qui contiennent des descriptions de leur usage comme médecines, parfums et cosmétiques. Les bois gravés qui accompagnent le Commentaire de Piero Andrea Mattioli sont d'une telle beauté que leur valeur illustrative est encore appréciée aujourd'hui. En 1555, Giovanni Roseto publie ses célèbres Secrets de l'art de la parfumerie, « pour l'enrichisement du corps et de l'âme ». Et dans son Magia Naturalis, Giovanni Battista della Porta (1536-1615) prône l'utilisation du verre, parce que non réactif, dans l'extraction des huiles essentielles et de l'alcool à partir des plantes. A la même époque les Vénitiens perfectionnent l'art de la fabrication du verre sur l'île de Murano.
Au XVe siècle, les Français ne méconnaissaient pas totalement l'art des senteurs. Hommes et femmes portaient de petits sachets, ou « coussines » dans leurs vêtements et conservaient leur parfum dans des flacons moulés en terre, les « cyclades de Chypre ». Mais les techniques de la parfumerie française étaient encore balbutiantes comparées à celles de l'Italie. Il faudra attendre le début du XVIe siècle et le règne de François Ier pour que le goût italien en matière d'arts, de mode, d'horticulture et d'architecture, commence à pénétrer en France et ait une influence majeure sur le mode de vie.
En 1533, le fils de François Ier, Henri II, épousait une noble florentine, Catherine de Médicis, événement qui allait entraîner de profonds bouleversements dans la culture française car la nouvelle reine apportait avec elle tous les arts et raffinements de la Renaissance italienne. Son parfumeur, Renato Bianco, installait à Paris une boutique sur le pont au Change.
Son alchimiste, Cosimo Ruggieri, s'établissait également en France. Et au siècle suivant, la faveur du parfum en France dépassait toutes celles qu'il avait pu connaître dans le reste du monde.
La région de Grasse, connue pour ses tanneries, fut favorisée par Catherine de Médicis pour produire des herbes et fleurs à parfum et devint le centre le plus important du parfum, succédant ainsi au berceau de la parfumerie française, Montpellier asseyant alors sa renommée sur la production de gants de cuir parfumés. Cette activité trouvera son lieu d’élection dans la bonne ville de Millau.
Mais dans le beau royaume de France tout le monde ne sacrifiait pas aux coutumes italiennes. Henri IV (1553-1610) notamment les considéraient comme trop maniérées et l'une de ses maîtresses dira de lui qu'il « puait comme charogne » !
L'art de la parfumerie s’était développé dans l'univers raffiné des cités italiennes, en particulier Venise qui en fut la terre d’élection. C’était la ville la plus riche d'Europe qui, grâce à ses comptoirs et sa flotte, eut le monopole des épices d'Orient, et le recueil publié en 1555, premier traité de parfumerie, recensait 328 préparations parfumées, constituant pendant plus de deux siècles la base de tous les livres traitant de l’art de la parfumerie.
Grâce à l'action de Marie de Médicis, ce fantastique réseau d'activité se concentra à Grasse qui traita bientôt rose musquée, fleur d'oranger, camphre, gingembre, clou de girofle, ambre, benjoin pour parfumer poudres, eaux, bains de bouche, huiles ou pommades.
L’image de « l’habit de parfumeur » rappelle qu'une codification sévère réglementant l'activité de parfumeur fut promulguée sous Louis XIV. Cet acte clôturait l’action de Marie de Médicis qui avait prononcé la séparation des Parfumeurs et des Apothicaires.
Grasse ouvrait alors la voie royale qui devait la conduire au statut de capitale mondiale des parfums, du tannage, de la ganterie etplusieurs quartiers de Grasse furent peuplés par les familles d’ouvriers des tanneries et d’employés de la parfumerie, si nombreuses qu’il fallut rehausser les maisons d’un ou plusieurs étages. Cette curiosité « architecturale » est encore visible aujourd’hui dans certains quartiers du centre historique.
La philosophie de lutte contre l’obscurantisme et de promotion des connaissances du Siècle des Lumières n’est pourtant pas parvenue à rétablir le concept d’hygiène corporelle pratiqué durant le lumineux 12ème siècle ! Préconisée par les religions, au motif que la propreté du corps reflète celle de l’âme, la pratique du bain héritée de l’Antiquité gréco-romaine fut condamné à la Renaissance car jugée amorale. Pourtant la purification corporelle fait l’objet de nombreuses recommandations dans la Bible et le Coran et le premier sacrement d’initiation chrétienne se fait par le baptême dans l’eau.
Pendant plus de deux siècles donc, le parfum servira à dissimuler les mauvaises odeurs par des senteurs lourdes, jusqu’à l’élaboration d’un hydrolat additionné d’eau de vie et de décoctions parfumées pour donner une eau de toilette légère permettant « la toilette sèche ».
Ainsi commençait l’histoire rocambolesque, mystérieuse et toujours controversée de l’Eau de Cologne et de la saga des Farina. Vers 1690, Gian Paolo Feminis, un colporteur émigré de la vallée d’Ossola, s’installait à Cologne, chez une tante qui tenait une boutique de produits français de luxe. Il serait l’inventeur de la formule de l’Aqua Mirabilis, commercialisée sous le nom de « Aqua Admirable », référencée en 1727 à l’université de la ville dont il était devenu citoyen.
En 1709, dans la même ville, un certain Jean Marie Farina ouvrait une boutique de parfums nommée « Jean-Marie Farina vis-à-vis la place Juliers ». Héritier de la formule, il créait « l’Eau de Cologne ». En 1806, un arrière-petit neveu homonyme, ouvrait une boutique à Paris, Faubourg Saint-Honoré et commercialisait la prestigieuse « Eau de Cologne » dont il revendiquait la création, créant ainsi la controverse.
En 1862 était créée la maison Roger & Gallet, détentrice et propriétaire de la signature Jean Marie Farina.
CONCLUSION
Raconter le parfum c’est écrire un conte merveilleux qui traverse les fragrances subtiles exhalées de la mémoire olfactive enfouie pour raconter l’histoire de toute l’humanité !
Souvenons-nous que, dès les temps bibliques, le parfum fut un instrument de séduction qu’employèrent les filles de Loth après la destruction de Sodome et Gomorrhe, et qu’il était largement diffusé à l’entrée des lieux de culte comme le Temple de Jérusalem où Marie-Madeleine achetait les parfums de prix pour verser sur la chevelure du Christ. Outre l’offrande aux dieux, le parfum s'imposa comme l’incontournable parure de la femme, comme si elle eut pu se vêtir de lui seul, et traversa les siècles, complice suave et discret de sa beauté, et complice aussi des secrets d’alcôve,indispensableélément de sa séduction et de son mystère.
Repliée au fond de sa lagune, isolée dans une mer fermée qui l’avait définitivement écartée des routes nouvelles du grand commerce avec les Nouvelles Terres, la Sérénissime avait vécu sa gloire et consommait sa lente et magnifique agonie.
Désormais, des armadas de nefs océanes espagnoles et portugaises ouvraient d'autres voies maritimes et ramenaient de nouvelles matières premières : vanille, tabac, girofle, cacao, cardamome, qui par l’effondrement des prix instauraient une inexorable et fatale concurrence.
La Sérénissime avait vécu sa splendeur et, dans une irréversible agonie, sombrait lentement vers les abysses de l’oubli.
De la splendeur passée il ne resta que le souvenir de l'ivresse du parfum et l’engouement pour le charmant petit flacon en cristal de Venise qui avait séduit toutes les cours d'Europe.
15 Juin 2021
DES MILLIONS AU CIMETIÈRE?
(De Tourrettes bien sûr!)
Élizabeth Duriez
Cimetière, du latin coemeterium, vient du grec Koimeterion, lieu où l’on dort, lieu de sépulture….Dormir, car dans les principes religieux, on n’est pas proprement morts, mais l’on dort en attendant la résurrection générale.
Dans le monde antique, il était interdit d’inhumer ou de brûler les cadavres à l’intérieur de la cité.
Plus tard, les Empereurs permettront l’inhumation intra muros; le cimetière étant un lieu sacré et inaliénable où « reposent » les morts.
Sous l’empire de Charlemagne, pour rompre définitivement avec la coutume païenne de la crémation des dépouilles, il est prescrit l’obligation de l’enterrement et l’interdiction jusqu’à une date récente (1964) de l’incinération. Les Chrétiens des premiers siècles ont une croyance aiguë en la proche résurrection d’un « corps glorieux ».
Donner une sépulture aux défunts avec l’idée que plus on est proche de Dieu, plus on est sous sa protection, amène à choisir de se faire inhumer dans, et autour de l’église. Pourtant les inhumations dans les églises furent interdites sauf pour les évêques, les abbés et parfois certaines corporations. Bien que ces interdits soient réitérés jusqu’à la fin du IXe siècle, l’usage d’enterrer dans l’église se fait insensiblement.
On n’y enterre d’abord les dignitaires laïcs et ecclésiastiques, les fondateurs, puis les bienfaiteurs d’églises et de couvents; enfin, depuis plus de huit cents ans, on y enterre les laïques indifféremment.
Juridiquement, les tombes sont de deux sortes:
- celles des fondateurs d’églises et de chapelles leur appartiennent en toute propriété ainsi qu’à leurs descendants ou successeurs;
- les parties du sous-sol d’une église peuvent être concédées sans limitation de durée à des familles ou à des corps organisés.
Mais le clergé peut autoriser l’inhumation dans le sol de l’église, sans besoin de concession.
Le cimetière étant terre sainte, il était logique, sous l’Ancien Régime et même, dans une certaine mesure, jusqu’en 1904, que ceux qui n’étaient pas morts dans la communion de l’église n’y aient pas accès.
Le refus d’obsèques religieuses emportait nécessairement le refus proprement dit de sépulture.
En sont exclus : les comédiens, les enfants morts sans avoir été baptisés, les suicidés, ceux qui meurent dans les tournois et les duels, les usuriers publics, les excommuniés, les hérétiques, les apostats, les schismatiques, etc…Les condamnés à mort ne pouvaient recevoir la sépulture ecclésiastique qu’après accord du pouvoir civil. Mais dans le cas d’hérésie ou de sorcellerie, ils étaient brûlés et leurs cendres jetées au vent.
En ce qui concerne l’inhumation des épouses et des veuves, celles-ci doivent être enterrées avec leurs époux. Les époux partageront la même tombe, car ils ne sont qu’une seule chair et l’homme ne doit pas séparer ceux que Dieu a unis. Une femme qui a été mariée plusieurs fois sera enterrée avec son dernier époux, dont elle conserve le domicile et le nom. Une femme décédée avant son mari, et n’ayant pas de sépulture, doit être inhumée dans celle choisie par son époux ou dans celle de ses ancêtres si le mari n’a choisi aucune sépulture.
Comme les cimetières sont « terre sainte », ils sont donc fermés aux autres religions. Ce qui causera beaucoup de problèmes au XVIe siècle avec l’apparition de la religion protestante. Le cimetière commun aux deux confessions est rare.
Cela occasionnera des obsèques dans des lieux improbables comme un jardin, une cave, …
Le XVIIIe siècle amène une évolution dans les mentalités. On s’inquiète à propos des corps décomposés , de leur « redoutable chimie », et donc de son voisinage avec les habitations.
Ainsi c’est la coupure.
Avant 1750, le cimetière est « terre d’église », au milieu de la cité, ouvert à tous, et les sépultures dans les églises sont fréquentes.
Mais par le décret du 23 Prairial An XII (12 Juin 1804), Napoléon, Empereur des Français, décrète qu’il appartient, sauf exception, aux communes de s’occuper des cimetières, où tout un chacun a droit d’y être enterré; l’endroit est normalement clôturé et repoussé hors de la ville; les sépultures dans les églises interdites. (Ceci est la résultante d’une loi de la Convention du 12 Frimaire An II (1793) signifiant que les cimetières déjà appartenant aux églises appartiennent désormais aux communes; (décision définitive). Ce décret informe également sur l’emplacement des cimetières, leurs conceptions, la taille des fosses.
Un décret du 19 Juin 1808 permettra aux évêques et archevêques d’être inhumés dans leurs cathédrales après décision du Chef de l’Etat, (jusqu’en 1905), sur avis du ministre des cultes. Subsistent également les affectations spéciales de Saint-Louis-des-Invalides réservé aux dignitaires militaires, de La Chapelle des Orléans à Dreux et de La Chapelle Impériale d’Ajaccio, auxquelles s’ajoute le cas particulier du Panthéon.
Mais l’Ordonnance Royale relative aux cimetières du 6 Décembre 1843, voulue par Louis-Philippe 1er, Roi des Français, va définitivement gérer nos cimetières; Cette loi est toujours d’actualité.
Art.1er: Les dispositions des titres Ier et II du décret du 23 Prairial an XII, qui prescrivent la translation des cimetières hors des villes et des bourgs, pourront être appliquées à toutes les communes du royaume.
Art. 2: La translation du cimetière, lorsqu’elle deviendra nécessaire, sera ordonnée par un arrêté du préfet, le conseil municipal de la commune entendu. Le préfet déterminera également le nouvel emplacement du cimetière, sur l’avis du conseil municipal et après enquête de commodo et incommodo.
Art. 3: Les concessions de terrains dans les cimetières communaux, pour fondation de sépultures privées, seront, à l’avenir, divisées en trois classes:
1. Concessions perpétuelles.
2. Concessions trentenaires.
3. Concessions temporaires.
Une concession ne peut avoir lieu qu’au moyen du versement d’un capital, dont deux tiers au profit de la commune, et un tiers au profit des pauvres ou des établissements de bienfaisance. Les concessions trentenaires seront renouvelables indéfiniment à l’expiration de chaque période de trente ans, moyennant une nouvelle redevance qui ne pourra dépasser le taux de la première.
A défaut du payement de cette nouvelle redevance, le terrain concédé fera retour à la commune, etc…(je vous fais grâce du reste).
La résultante à Tourrettes :
1) Il y a de cela trente ans, fut entrepris la restauration du sol de l’église actuelle datant du début du XVIe siècle. On y trouva des ossements. Mais la mairie ne donna pas suite.
Alors que peut-on supposer?
- S’agit-il des défunts tourrettans, lorsque le cimetière attenait à la première église du XIe siècle? (Edifice qui se trouvait à l’emplacement de l’actuelle maison qui jouxte l’église).
- S’agit-il de malheureuses victimes des guerres de Religion? Ou autres périodes?
Nul ne le sait. Mais peut-être qu’un jour des recherches seront entreprises…
2) Au cimetière actuel de Tourrettes, la partie « historique « se trouve à gauche de l’entrée, après avoir longé la façade ouest de la Chapelle des Pénitents. Quelques personnalités tourrettanes y sont enterrées. Elles se trouvent essentiellement dans le carré central de cette partie du cimetière.
Suite à l’Ordonnance Royale de 1843 concernant les concessions, cette loi fut mise en exergue sous le Second Empire. On peut imaginer que seules les personnes ayant un certain statut pouvaient se permettre d’acheter une concession. Les autres, n’ayant pas les moyens étaient toujours enterrés suivant les anciennes traditions, à savoir mis dans un linceul et directement en terre et ce, pendant cinq ans. Seule une croix plantée sur le monticule de terre signifiait la présence d’une tombe. Au bout de cinq ans, les ossements des défunts étaient transférés dans l’ossuaire; la fosse commune étant réservée aux indigents.
La première personne qui acheta une concession au cimetière de Tourrettes est Madame Anne Scolastique Talent, veuve du Général Fabre. Après négociation avec la Mairie durant l’année 1863, elle obtint la concession le 13 Janvier 1864. L’emplacement est pour elle-même et pour les membres de sa famille. C’est une concession perpétuelle. Ainsi, certains membres de sa famille se trouvent effectivement dans cette tombe, tous honorables notables de la région.
Mais où se trouve le Général Fabre?? C’est la grande question!
Certes il ne serait pas le premier personnage célèbre en France à ne pas avoir de sépulture connue. Difficile à le croire dans un si petit village…
Pendant la fête de la Saint Martial à Tourrettes en Septembre 1867, un habitant de Montauroux rendit visite à Madame La Générale. Dans une lettre à son fils, il expliquera qu’en quittant son hôtesse, il est passé devant la tombe du Général au pied de l’escalier.
Donc en 1867, le Général est toujours enterré au château.
Et là intervient une première hypothèse:
Si ce Montaurousien en est convaincu lors de sa visite au village, il n’en est pas de même pour certains Tourrettans. Car il est admis que dans la salle du rez-de-chaussée, un socle ovale destiné à recevoir son tombeau a été réalisé avant son décès en 1844. Mais le Général serait mort avant la fin des travaux et aurait été enseveli dans une sépulture provisoire qui s’avèrera définitive car le tombeau n’aurait jamais été achevé.
Dans ce cas précis, impossible de le retrouver, car la loi de 1843 n’est pas encore appliquée à Tourrettes.
La Générale décède en 1877. Et après? On sait que la succession fut difficile, le château étant devenu copropriété de copropriétaires. Le château fut démantelé et devint une ruine plus rapidement que s’il avait été victime d’un séisme. Le maire du village, devant le vandalisme, fit transporter les restes du Général au cimetière. Mais où?? (Ceci est la deuxième hypothèse).
Sachant que l’église ne sépare pas les époux dans la vie comme dans la mort, on peut supposer que son corps se trouve au côté de son épouse…Mais nous n’en avons pas la trace.
Troisième hypothèse: Les descendants du Général Fabre sauraient-ils où il est enterré? (Ils ne se sont jamais exprimés à ce sujet.)
Autres hypothèses:
D’autres suggèrent qu’il serait peut-être enterré dans une des tombes de l’un de ses frères, mais là encore…Aucune trace!
Beaucoup de spéculations courent …
Peut-être que la Mairie de Tourrettes devrait procéder comme la reine d’Angleterre!
En effet, dès son accession au trône, Elizabeth II a lancé un défi, car elle est également Duc de Normandie (et non Duchesse):
11 millions de livres à qui trouvera les restes de son ancêtre, la belle et sulfureuse Aliénor d’Aquitaine. Elle est morte à Poitiers, mais son gisant se trouve à l’Abbaye de Fontevraud…vide!
Est-ce qu’à sa mort la proposition deviendra caduque? L’avenir nous le dira.
Ainsi, en proposant une récompense monétaire, peut-être que cela permettrait de savoir enfin où se trouve notre Tourrettan si célèbre!
"Artichauts à la barigoule" la recette provençale qui subjugua Catherine de Médicis lorsqu’elle épousa Henri II et devint reine de France.
15 Mai 2021
Un chardon qui fit la conquête d’une reine de France !
Gérard Saccoccini
Dans une précédente chronique de la Gazeto, nous évoquions les apprêts de la cuisine du Moyen Age, dans nos campagnes et dans nos villes, ainsi que les différents légumes et ingrédients utilisés. Nombre d’entre eux sont aujourd’hui en partie relégués aux oubliettes de l’Histoire alors que d’autres ont traversé les millénaires et ont régalés les convives de nos tables inventives. Presque toujours, les légumes étaient issus de souches sauvages que nos paysans s’attachèrent à domestiquer. Beaucoup furent dédaignés et considérés indignes de figurer sur les tables de la noblesse et de la bourgeoisie, jusqu’à ce qu’un caprice, un phénomène de mode ou un besoin d’exotisme les réhabilite.
Au terme d’un voyage de plusieurs millénaires arriva dans nos campagnes de Provence un chardon que des générations de paysans opiniâtres et de savants agronomes réussirent à domestiquer pour le rendre consommable. Ses bourgeons, sommés de couronnes épineuses, éclataient en bouquets d’inflorescences délicates aux riches couleurs bleues ou violacées. Sous le nom savant de Cynara cardunculus sylvestris se cachait l’ancêtre sauvage de la variété cardunculus scolymus, plante dicotylédone de la famille des Astéracées, du genre Cynara.
Plus prosaïquement nommée artichaut, il semble avoir été connu des médecins et botanistes Grecs, établis dans leurs colonies de Sicile, qui l’utilisèrent sous sa forme de cardon aux feuilles finement ciselées pour des décoctions savantes propres à nettoyer l’organisme de ses humeurs et à purifier le sang. Au 1er siècle, Pline le mentionne et relate qu’il est très apprécié par les Romains qui l’utilisent aussi pour ses vertus prétendues aphrodisiaques.
Mais s’agissait-il bien de la même plante ?
Vraisemblablement originaire des rivages de la Mer Rouge, il était connu des anciens Égyptiens et sa culture s’est ensuite répandue en Afrique du Nord. Avec les conquêtes arabes du 8ème siècle, il arrivera au terme d’un long voyage dans le Sud de l’Espagne où les agronomes d’Al Andalous le modelèrent pour obtenir la forme que nous lui connaissons, avant d’en diffuser la production dans les campagnes de l’émirat de Sicile et des possessions d’Italie du Sud.
L’artichaut que nous consommons aujourd’hui n’est apparu chez nous qu’à la fin du Moyen Age, après avoir fait l’objet de lentes et patientes expériences pour modifier son bourgeon floral afin de le rendre comestible (ainsi l’homme disputa à l’âne le privilège d’en déguster les riches saveurs poivrées).
Le développement de sa culture sera souvent soumis aux hasards et aux vicissitudes de l’histoire et, aussi surprenant que cela paraisse, il fut principalement dû aux échanges commerciaux du monde des affaires de la Renaissance.
En 1466, le richissime banquier Filippo Strozzi le fit venir de Naples, alors vice-royauté espagnole, pour l’acclimater dans ses domaines de Toscane. L’engouement pour ce légume fut tel que son négoce lucratif gagna les familles florentines des Bardi, des Peruzzi et des Baroncelli. Proches des papes, ces derniers s’installèrent en Avignon et en favorisèrent la culture qui s’étend aux terres fertiles du Comtat, au confluent du Rhône et de la Durance et dans les jardins d’Avignon.
Une légende (mais ce n’est sans doute qu’une légende) raconte que la belle Laure aimait à le cuisiner pour régaler le divin Pétrarque.
En 1532, Olivier de Serres cite le Dauphiné et la région lyonnaise comme le « pays des cardes ». Dans les terres de Provence, l’artichaut atteint sa forme et ses couleurs actuelles, ainsi que son appellation de « petit violet ». Comme le câpre, qui est un bourgeon floral que l’on récolte avant l’éclosion, il est cueilli pour être consommé avant que le capitule portant l’inflorescence ne laisse éclore la fleur. Il est surtout considéré comme un plat de pauvre que l’on consomme bouilli, « à la croque-sel » ou en vinaigrette.
Lorsque les Juifs furent expulsés d’Espagne par l’Inquisition, en 1492, ils quittèrent également la Sicile alors possession espagnole et s’exilèrent dans le ghetto de Rome où ils introduisirent la culture de l’artichaut et la recette des « carciofi alla giudia », encore largement proposée aujourd’hui dans les restaurants de la Ville Éternelle.
Ceux qui s’installèrent dans le ghetto de Venise en répandirent la culture jusqu’en Lombardie et le préparaient cuit lentement, à l’étouffée, une manière succulente de conserver tous ses parfums, ses arômes et sa saveur subtile.
Mais il sera accommodé de mille autres manières, selon les terroirs et l’inventivité des cuisiniers, et l’on prétend que c’est la recette provençale qui subjugua Catherine de Médicis lorsqu’elle épousa Henri II et devint reine de France.
La reine était une épicurienne et elle adorait bien manger (et beaucoup manger). Elle connaissait bien sûr ce légume dont elle raffolait depuis son enfance à Florence, mais c’est la manière provençale de l’accommoder qui emporta ses suffrages. Elle en découvrit la recette lors du mariage de Mademoiselle de Martigues avec Monsieur de Loménie, le 19 juin 1576. Dans l’impossibilité de réfréner sa gourmandise, elle en mangea tant et tant qu’elle en fit une indigestion et « en pensa crever » selon le chroniqueur Pierre de l’Estoile. Elle ne renonça pas pour autant à son péché de gourmandise, imitée en cela par les courtisans de sa suite, ce qui contribua à lancer la mode de cette recette dans le beau royaume de France.
Il semblerait que Louis XIV en raffolait aussi.
Voici la recette la plus proche de celle qui fit la conquête de la reine, lors de sa visite à Toulon et à Hyères, préparée avec les « petits violets du Midi » dont les plus prisés venaient d’Ollioules ou de Carqueiranne.
On ôte soigneusement les premières feuilles trop dures, puis on cisèle le bourgeon en coupant les feuilles au-dessus des parties tendres et on épluche soigneusement la hampe. Il faut tremper les artichauts dans de l’eau claire additionnée de jus de citron pour éviter qu’ils noircissent et on évide le cœur pour ôter les barbes.
On assaisonne à cru, en prenant soin que le sel, le poivre, le thym et le laurier broyés et les quatre épices s’insèrent bien entre les feuilles. Il faut hacher menu un oignon, une gousse d’ail et un morceau de lard gras que l’on fait blondir dans l’huile d’olive vierge.
Les bourgeons sont ensuite coupés en quatre dans la longueur, puis couchés bien serrés sur cette préparation. Arrosés de bouillon et d’un peu de vin blanc, ils vont cuire une heure, à couvert et à four doux.
On désigne cette préparation soignée et longuement mitonnée dans une cocotte en fonte : « Artichauts à la barigoule ».
Si vous souhaitez la reproduire, la reine vous souhaite un bon appétit !
AUX ARMES LES TRICOTEUSES !!
Elizabeth Duriez
« L’usurpateur », appelé ainsi, à peine le dos tourné, et encore sur le bateau qui l’emmenait loin vers Sainte Hélène, « l’usurpateur » donc, ne laisse pas indifférent. Les passions envers Napoléon sont toujours aussi contradictoires!
« Ma gloire n’est pas d’avoir gagné quarante batailles, Waterloo effacera le souvenir de tant de victoires!
Ce que rien n’effacera, ce qui vivra éternellement, c’est mon Code Civil, ce sont les procès-verbaux du Conseil d’État. » (Napoléon)
Certes on lui doit:
Le Code Civil - L’égalité des Citoyens - La Banque de France - Les Préfectures - Les Lycées -
La Légion d’Honneur - Polytechnique (version militarisée) - Le Conseil d’État - Le Baccalauréat -
La Cour des Comptes.
Contesté, détesté, admiré, controversé…On ne peut effacer Napoléon sinon on ne comprend plus rien à ce qui nous entoure. Toutefois, il est un sujet sur lequel tout le monde est d’accord : sa misogynie!
Justement parlons-en!
Les historiens ont souvent débattu pour savoir si Napoléon fut l’héritier de la Révolution française ou son contraire, mais pour ce qui est du droit de la femme, c’est indubitablement un fossoyeur !!
Avec le Code Civil (1804), la situation des femmes françaises devient une des pires de l’Europe!
Car pour Napoléon, « la femme est notre propriété, nous ne sommes pas la sienne; car elle nous donne des enfants, et l’homme ne lui en donne pas. Elle est donc sa propriété comme les plantes sont celles du jardinier. »
Article 213 du Code Civil:
« Le mari doit protection à sa femme, la femme obéissance à son mari ».
C’est Napoléon qui a insisté pour que c’est article soit lu lors de la cérémonie du mariage, car « il importe dans un siècle où les femmes oublient le sentiment de leur infériorité de leur rappeler avec franchise la soumission qu’elles doivent à l’homme qui va devenir l’arbitre de leur destinée.»
La femme mariée prend le nom et la nationalité de son mari. Elle ne peut ni choisir, ni quitter le domicile conjugal.
« Le mari doit pouvoir avec modération joindre la force à l’autorité pour se faire respecter ».
Autant dire que les violences conjugales sont tolérées…
Le Code établit l’incapacité civile de la femme mariée. Elle est considérée comme mineure.
Sans autorisation du mari :
- pas de travail
- pas de compte bancaire
- impossibilité de faire des papiers
- impossibilité d’ester en justice
- impossibilité de passer des examens
Si son mari l’a autorisée à travailler, il récupère son salaire.
Seule la dot n’est pas concernée (car bien familial de Madame).
Les époux se doivent fidélité.
Pas dans la réalité!
Pour Madame, l’adultère est un délit passible de 3 mois à 2 ans de prison.
Pour Monsieur,…juste une amende!!
L’enfant adultérin devrait être reconnu par le père, et de cela, il n’en est pas question!
Mais si l’homme a un enfant hors mariage…..à la mère de se débrouiller!
Les « filles-mères » perdent tout ce qu’elles avaient gagné pendant la Révolution. La recherche en paternité restera interdite jusqu’en 1912.
Pas d’héritage pour les enfants naturels.
Pas de dédommagement aux filles séduites, abandonnées, violées.
Le crime commis par le mari sur la femme adultère est considéré comme « excusable ». (Article 324 du Code Pénal, dit article rouge).
Il faut attendre le XXe siècle pour que le Code soit progressivement transformé.
1905 : Les femmes mariées obtiennent d’ester en justice sans le consentement de leur mari.
1907: Elles peuvent disposer de leur salaire (mais pas gérer les autres biens).
1938: Réforme de l’article 213. Suppression de l’incapacité juridique des femmes. Suppression également de la puissance maritale et l’épouse n’est plus tenue au devoir d’obéissance. Mais le mari garde le choix du lieu de vie familiale; l’autorité paternelle; la possibilité d’interdire à sa femme de travailler.
1944: Droit de vote des femmes
1965: Les femmes obtiennent le droit de travailler sans l’autorisation de leur époux, et la possibilité d’ouvrir un compte en banque en leur nom propre.
1970: On ne peut plus imposer aux femmes le choix du domicile conjugal.
1975: Suppression de l’article rouge du Code Pénal. L’adultère est dépénalisé.
Aujourd’hui c’est le cinquantième anniversaire des 343 signatures de célébrités et anonymes françaises, dont Charlie Hebdo, en son temps, affubla d’un nom fort peu élégant et machiste.
Nous avons gagné quelques batailles, mais la guerre continue…
Rappelez-vous:
1967 : Un conseiller suggère au général De Gaulle la création d’un ministère dédié à la condition féminine.
Réponse du général :
« Un ministère de la condition féminine? Et pourquoi pas un secrétariat au Tricot?
Des participants masqués à une procession traditionnelle commémorant la Grande Peste à Venise, le 25 février 2020
SOUVENIRS DE VENISE
Une autre façon
de porter le masque
Gérard Saccoccini
La lagune de Venise est un prodigieux univers liquide dans lequel s’inscrit une île formée de plusieurs îles, où la lumière joue avec les miroitements de l’eau et les mille paillettes irisées des embruns.
Cet espace unique devient la scène idéale de la fête onirique dans laquelle les distinctions sociales s’expriment au cœur d’un des carnavals les plus fastueux et les plus élégants. Le masque y prend ses quartiers comme symbole de l’inversion du temps, de la dérision, de la caricature et de la satire populaire. Apparu dans des textes lombards du 7ème siècle, il y décline sous forme de divertissement des valeurs plus intellectuelles et aristocratiques tout en conservant l’énigme étymologique du mot qu’il acquit, au cours du 13ème siècle à Bergame, à savoir la valeur de « faux visage ».
Dans un environnement unique au monde, la Sérénissime inventa un rituel de la fête dont les manifestations, destinées à un public plus averti, se départaient de la trivialité de la rue, devenaient plus intimistes, plus nobles et plus érudites. La fête se fit alors raffinée, cultivée et théâtrale, comme celle donnée en 1520 en l’honneur de Frédéric de Gonzague, une « comédie villageoise » pour trois cent cinquante convives.
Les masques de la commedia dell’arte devinrent bientôt les signes de toute fête, et investirent les fresques des palais, les salles de bals et les salons de jeu. Toute une société en fête se regardait sur les toiles de Guardi, Longhi et Tiepolo. Ainsi naquirent les carnavals de théâtre en même temps qu’une forme d’expression unique qui se tenait à l’extérieur des palais et des hôtels particuliers. Mais à Venise, où la rue est un salon, l’extérieur confiné resta toujours le salon intimiste d’une société vivant en vase clos !
Le grand Goldoni, le « Molière vénitien », l’éleva au rang de genre littéraire. « Masques et Bergamasques » et leurs fêtes galantes inspireront plus tard Verlaine, Debussy et Fauré. Retenons toutefois qu’à Venise le masque ne fut jamais l’attribut essentiel du carnaval qui se déroulait la plupart du temps à visage découvert. Le port du masque ne se généralisa pour la période du carnaval qu’à partir du 18ème siècle : elle débutait en octobre pour s’achever à Mardi Gras !
Dès lors, un carnaval permanent s’affichait à Venise, suivant les caprices des itinéraires traversant la cité des brumes et des clapotis silencieux, l’univers de songes aux ombres évanescentes cher aux romantiques où se révélaient la beauté irréelle et l’indéniable harmonie d’une ville n’échappant pas à la mélancolie et à l’impression de désarroi que lui conférait son terrible et inéluctable destin.
Venise qui inventa le parfum en a fait la subtile parure des belles vénitiennes accompagnées de leur sigisbée en cape de nuit et bauta blême.
Lorsque les constellations commencent à piquer de scintillements d’argent le noir canevas céleste, des bouquets de femmes aux cheveux poudrés glissent le long des rives mystérieuses, dans cette secrète alchimie du théâtral, de l’ombre et de la lumière, du silence et des clapotis qui fait la séduction de la cité : « Vénus sortie de l’onde »...
Dans le brasillement des cierges, une vierge cantonnière nous indique le chemin de la Sacca della Misericordia et du Campo dei Mori, là où vécut Tintoret.
Des nappes laiteuses envahissent l’eau noire du Canal Grande. Des langues de terre brune, repoussant le flot, courent sur la lagune agitée de songes, griffée de lune.
Sous le pont des Scalzi, un gondolier pleure sa Colombine, son rêve évanoui.
Pauvre Pierrot ! Sur ta joue, le pinceau de Carpaccio dessine une larme de grenat. Une larme rouge vif, du sang de la terre de Bardolino, qui pleure une ombre évanescente dont il ne subsiste qu’une fragrance légère :
« … seul m’est resté, madame, votre parfum qui flatte
Et longtemps, longtemps, par ondes délicates,
Un peu de vous flotte dans l’air ».
Adieu Monsieur le Masque, la fête est finie !
Mais pour que s’accomplisse le grand cycle immuable qui ramènera la fête de l’inversion du temps, la règle reste la même : ne jamais chercher à percer l’identité de celui (ou celle) qui dissimule ses traits sous le masque.
La Gazeto de « Tourrettes Héritage » N°55
MALVEILLANCE …
FAUSSES NOUVELLES …
VACCINS ...
Qui a dit: « C’était mieux avant ! »
Elizabeth Duriez
Sous le règne de Louis XVIII, les préfets envoyaient à tous les maires de France les ordres du gouvernement par arrêtés répertoriés sous forme de livre, considérant que les feuilles volantes se perdaient facilement.
Ainsi, le préfet du Var, Monsieur Siméon, envoie les circulaires qui suivent:
6 Février 1816
« Messieurs,
Je suis informé qu’on a osé faire circuler dans le département les nouvelles les plus absurdes. Cette manœuvre de la malveillance ne mériterait que le mépris, si l’autorité publique pouvait mépriser tout ce qui tend à abuser de la crédulité, et à entretenir dans les esprits une agitation funeste. Immédiatement rapprochés du peuple, vous ne devez, Messieurs, négliger aucun moyen pour détruire l’effet de ces fausses nouvelles, empêcher qu’elles ne se propagent et en démontrer la fausseté.
Ces sortes de bruits tendent à inspirer des craintes chimériques, à ébranler la confiance et surtout la fidélité au Roi, à faire douter de la force du gouvernement. (…)
Les personnes qui se permettent de les répandre, même de les répéter, sont évidemment des ennemis du Roi, du bon ordre et de la tranquillité publique, et vous ne devez pas hésiter à les faire arrêter sur-le-champ, quelles qu’elles soient. Tout individu qui répandrait ou accréditerait des alarmes est coupable d’actes séditieux. (…)
Réclamez le concours de MM. les Curés et Recteurs. Personne ne peut vous aider plus efficacement à démasquer l’imposture et à faire ressortir la vérité.
Je compte, avec une entière confiance, sur le plein succès de vos efforts.(…) »
2 Avril 1816
« Messieurs,
(…) Il est un objet bien essentiel et intimement lié à la paix publique sur lequel je ne saurais trop fixer votre attention : c’est la circulation des fausses nouvelles inventées pour tromper le peuple et ébranler la confiance que tout Français doit avoir pour le Gouvernement paternel du meilleur des Rois. Je vous ai déjà recommandé, notamment par ma circulaire du 6 février dernier, de ne pas hésiter à faire arrêter, en m’en prévenant sur-le-champ, toute personne qui sèmerait ou accréditerait des alarmes. L’emploi de cette mesure de rigueur, indispensable dans les circonstances actuelles, ne doit pas vous empêcher d’user de tous les moyens qui sont en vous pour éclairer vos administrés. (…) Parlez le langage de la persuasion, de la fermeté pour les convaincre que les bruits répandus sont aussi dénués de vérité que de vraisemblance.(…)
Je vous ai autorisé à réclamer le concours de MM. les Curés et les Recteurs. Leur influence combattra avec avantage ces attaques ridicules qui sont la dernière arme contre des méchants. Qu’enfin ces éternels ennemis de l’ordre, voyant l’inutilité de leurs tentatives, se lassent de vouloir égarer l’opinion publique, et ne cherchent plus à empoisonner le bonheur dont nous jouissons à l’abri du trône de Louis le Désiré. (…)
Je vous serai obligé de m’informer avec exactitude de ce que vous aurez fait pour atteindre le noble but que je présente à toute votre vigilance. »
28 Avril 1816
« Messieurs,
Mes prédécesseurs vous ont souvent entretenu des avantages inappréciables de la Vaccine. Ces avantages ne sont plus un objet de discussion; les recherches, les épreuves, qui ont eu lieu depuis près de 20 ans, et les travaux assidus et nombreux des divers Comités établis dans tout le Royaume, les ont constatés d’une manière inattaquable. Maintenant que les gens de l’art ont démontré l’efficacité de cette méthode, c’est à l’Administration qu’il appartient d’en rendre, par ses mesures, la pratique générale et populaire. Tel est, Messieurs, l’objet de l’Arrêté que j’ai l’honneur de vous adresser.(…)
Bannir entièrement la petite vérole du département, voilà le but que nous devons nous proposer. Ne négligez rien afin d’obtenir un résultat aussi important. (…)
Que chacun de vous, Messieurs, ne cesse d’exhorter les pères de famille à faire vacciner leurs enfants. En plaçant devant leurs yeux, d’un côté, le tableau déchirant ou hideux d’un enfant moissonné ou défiguré par la petite vérole, de l’autre, l’extrême facilité de repousser cet épouvantable fléau. (…)
NOUS PRÉFET DU VAR, Chevalier de la Légion d’Honneur, Commandeur de l’Ordre Grand-Ducal de Hesse-Darmstadt,
Ayant pris connaissance de la situation du département, sous le rapport de la propagation de la Vaccine,
Convaincu que les efforts de l’Autorité pour donner à la pratique de cette méthode salutaire une impulsion générale, n’y ont obtenu jusqu’à ce jour qu’un faible résultat;
Considérant que, parmi les découvertes en Médecine, celle de la Vaccine est une des plus importantes;
Qu’elle intéresse essentiellement la population et la santé publique;
Qu’à l’avantage de n’entraîner à sa suite aucun accident fâcheux, elle joint celui d’être un préservatif infaillible et constant de la petite vérole;
Qu’il est du devoir le plus sacré de l’Administration de ne rien négliger pour détruire enfin les préjugés qui pourraient s’opposer encore au succès d’un procédé, si simple dans ses moyens, si puissant dans ses effets, et d’en étendre et assurer les bienfaits à tous les individus. (…)
Les pauvres seront vaccinés gratuitement.
Tous les enfants trouvés, abandonnés, orphelins, en un mot, tous les individus admis, soit temporairement, soit définitivement dans les hospices, seront soumis à la vaccination, s’il n’appert, par des signes certains, qu’ils ont été vaccinés ou ont eu la petite vérole. Les vaccinations seront faites par le chirurgien de l’établissement.
Les Principaux des Collèges, les Chefs de Pensionnats, les Instituteurs et Institutrices des Écoles Primaires, n’admettront, dans leurs maisons, soit à titre d’externe, soit comme pensionnaire, que des élèves qui seront porteurs de certificats délivrés par des gens de l’art et visés par le Maire, lesdits certificats portant qu’ils ont été vaccinés ou atteints de la petite vérole.
Tout élève, admis présentement dans ces maisons, qui ne se trouveraient pas dans l’un ou l’autre des cas spécifiés ci-dessus, sera vacciné sur-le-champ.
Il ne sera donné aucun livret d’apprentissage, ni aucun travail, dans les ateliers ou établissements publics, aux individus qui n’auront pas prouvé qu’ils ont eu la petite vérole ou qu’ils ont été vaccinés.
Tous chefs d’ateliers, de fabriques et autres établissements particuliers, tous commerçants, marchands, maîtres de maisons, etc., seront invités par MM. les Maires à n’admettre, à titre de commis, ouvrier, apprenti, serviteur à gages, etc., quiconque ne justifierait pas, par un certificat authentique, avoir eu la petite vérole ou avoir été vacciné. (…)
A partir de 1817, et le premier Dimanche du mois d’Avril de chaque année, il sera décerné, dans chaque canton, sur les fonds départementaux, un prix en faveur de ceux des Médecins, Chirurgiens, Officiers de Santé, ou autres personnes du canton, qui, dans le courant de l’année précédente, aura montré le plus de zèle et pratiqué le plus grand nombre de vaccinations.
Ce prix consistera en livres ou en instruments de chirurgie. Il sera délivré par le Comité de canton, sur la délibération motivée dudit Comité, dûment visée et approuvée par les Comités d’arrondissement et de département. La séance sera publique.(…)
Indépendamment des prix de canton, et nonobstant les grands prix et récompenses accordés par le Gouvernement, il y aura un prix départemental, qui sera donné, comme ceux cantonaux, à celui qui sera reconnu avoir manifesté le plus de zèle pour la propagation de la Vaccine, notamment envers la classe pauvre, et obtenu le plus de succès.
Ce prix, d’une valeur de 300 francs*, consistera en livres ou en instruments de chirurgie.
Il sera décerné dans une séance publique du Comité central, qui aura lieu, à partir de 1817, le premier Dimanche de Mai de chaque année. Il sera rédigé un tableau nominatif des Vaccinateurs qui auront obtenu les prix.
Ce tableau sera imprimé et envoyé à toutes les communes et établissements publics du département.
Il en sera adressé un exemplaire à Son Excellence Le Ministre secrétaire d’état de l’Intérieur*, ainsi qu’à la Société centrale de Vaccine établie à Paris.
Epilogue:
* 300 Frs = environ 1300 € d’aujourd’hui
* Ministre de l’Intérieur: Joseph Henri Joachim, Vicomte Lainé (1767-1835)
Le Washington Post a répertorié 30573 fausses nouvelles envoyées par Donald Trump pendant ses quatre années de mandat présidentiel.
(note du rédacteur : "premier facteur de mortalité au dix-huitième siècle, la variole tuait, chaque année, 50 000 à 80 000 personnes en France, 25 000 à 30 000 en Angleterre. En 1796, Edward Jenner découvrait les fabuleuses propriétés de ce cowpox qui, transplanté de la vache à l’homme, immunisait contre le fléau. Entre 1800 et 1850, quelques centaines de vaccinateurs ont participé à une croisade sans précédent contre la variole sillonnant les campagnes, de village en village, de chaumière en chaumière, luttant contre la routine, et, parfois, contre l’hostilité des maires ou des curés. De surcroît, il n’était pas rare que le cowpox vînt à manquer ou perdît de sa virulence. Malgré tout, leurs efforts ont été couronnés de succès : au dix-neuvième siècle, la mortalité variolique s’effondre de 90 %.)
La Gazeto de « Tourrettes Héritage » N°54
C’est la première partie du titre de l’une des œuvres parmi les plus connues de Paul Gauguin, peinte à Tahiti de 1897 à 1898 et conservée au musée des beaux-arts de Boston, dont le questionnement est plus que jamais d’actualité ; surtout dans la formulation de la troisième partie : où allons-nous ? L’origine, la nature et la finalité de la vie sont au centre de cette interrogation métaphysique sur le sens de l’existence humaine. « Qui ne s’interroge pas est une bête, car le souci constitutif de toute vie humaine est celui de son sens. » Arthur Schopenhauer.
C’est entre le Tigre et l’Euphrate, dans les plaines accueillantes du Croissant fertile, que l’Homme cessa un jour d’être un nomade. Sans doute parce qu’il eut la prescience de l’art de cultiver.
Puis la révélation.
C’est en Mésopotamie, à Abu Hurairah, que commença l’histoire humaine des peuples sédentaires, à l’issue d’une longue errance. Associant l’eau, source de vie, au grain de blé enfoui, il put multiplier les épis et faire que la terre devienne la mère nourricière.
C’est ainsi qu’il prit conscience de son être et, inconsciemment, de son devenir.
Ainsi naquirent le dessin, le décor, le verbe, l’écriture, les incantations, les invocations propitiatoires et les religions.
Ainsi naquirent les civilisations !
Une pierre ramassée dans le lit d’un ruisseau, un morceau de bois façonné par les intempéries, ou un os trouvé sur le sol, révélèrent par leurs courbes et leurs volumes l’univers infini des formes, et l’incitèrent à en accuser les contours par quelques traits gravés. Ainsi naquit la sculpture !
De l’assemblage de mégalithes pour réaliser un dolmen (le premier ensemble construit) procèdent probablement les réflexions des bâtisseurs, car c’est sans doute pour soutenir les dalles de couverture des chambres funéraires que prit forme l’idée du linteau ! A la fin du néolithique, quelques 3000 ans avant J.C., l’homme découvrit l’architecture !
Sur un chemin qu’il mit des millénaires à parcourir, il se servit de l’image figurative pour commencer à communiquer. Comme ces centaines de mains interrogatrices, inquisitrices, imprimées il y a plus de 35 000 ans, sur les parois des grottes où résonnent leurs appels silencieux. Il la fit entrer, peu à peu, dans un système de codification complexe par lequel l’image représentée rendait visible la signification mentale de l’objet. Stupéfiant langage, non verbal mais universel, qui se développa aux mêmes périodes à Altamira, à Lascaux, dans la grotte Chauvet, en Amérique du Nord, en Argentine et dans l’archipel indonésien. Stupéfiante synthèse de systèmes de pensées complexes et de l’unité du génie humain, le langage s’est manifesté comme l’essence de tous les arts premiers, bien avant que ne se manifeste l’art de l’objet.
Lentement, les figurines et les pictogrammes composèrent un mode de lecture associant la phonétique aux symboles : le verbe était né. Il donna naissance à l’écriture.
La marche des sociétés primitives, leur hiérarchisation, la naissance du pouvoir et des religions ont sans doute créé le besoin de l’écriture. L’image est devenue « mot ».
Les images assemblées ont formé des phrases…
Puis des livres d’argile avant que d’être de pierre.
La relation « lecture de l’image » à « écriture de l’image » ne put se réaliser qu’au prix d’un long processus de codification des attitudes, des postures, des statures, de la gestuelle et des couleurs.
Gravés il y a près de6000 ans sur des tablettes d’argile, en pays de Sumer, les signes mystérieux de l’écriture la plus ancienne connue à ce jour furent exhumés des ruines des temples d’Uruk et de Lagash.
Un ancien mythe égyptien, que Platon rapporta, stipulait que l’invention de l’écriture n’aurait pu se réaliser qu’au détriment de la mémoire ! Alors, un curieux parallèle prend forme avec l’histoire mal connue de nos prétendus ancêtres les Gaulois dont nous savons peu de choses. Pour des motifs cultuels et politiques, la classe sacerdotale des druides privilégia la transmission orale, considérant que « l’apprentissage de l’écriture obère la mémoire ». De fait, ils n’écrivirent rien sur eux-mêmes et nous ne les connaissons que par les chroniques de la conquête romaine.
Les bruits de la nature composèrent le chant du monde. Le vent dans les arbres, la pluie qui crépite, les chants d’oiseaux, le murmure des sources, les gazouillis d’un nouveau-né ont rendu l’homme attentif aux sons. Par curiosité (ou par nécessité) il s’attacha à les capturer, à les reproduire et à les codifier pour traduire sentiments et émotions : la musique était née. Pourtant, pour pouvoir la restituer fidèlement, fallait-il encore établir le lien de l’écriture à la lecture.
Aux alentours de 1026, Guido d’Arezzo, un moine de l’abbaye de Pomposa, créa l’écriture musicale des notations surportée. Ainsi fut abolie l’inévitable corruption des œuvres transmises aux chantres par des maîtres à la mémoire parfois défaillante. La cacophonie devint harmonie.
D’où venons-nous ?
L’histoire évolutive de l’espèce humaine a pris forme depuis les brumes du lointain Paléolithique. Notre histoire se révèle comme le fabuleux voyage qu’Homère n’imagina jamais : l’odyssée de l’homme. Cette interrogation appelle une autre question, celle de la deuxième partie du titre : que sommes-nous ? Puis une autre encore, exaltante et angoissante à la fois, qui termine le titre et vient clore la lecture du tableau : où allons-nous ? L’odyssée de l’homme est la plus merveilleuse et la plus fantastique aventure, un prodigieux voyage à travers les millénaires qui a forgé son intellect et a fait de la culture son bien le plus précieux, son plus bel outil de progrès et de civilisation.
« Un homme sans culture est un arbre sans fruit ».
« Un homme sans vision, sans projet, sans objectif dans la vie est un homme sans destinée car c’est l’homme qui prépare sa propre destinée ». Antoine de Rivarol.
⭐️ BONNE et HEUREUSE ANNÉE 2021⭐️
Chers amis,
Je souhaite que ce message vous trouve en bonne santé, ainsi que vos proches
et tous ceux que vous aimez, et qu'il accompagne du mieux possible cette fin d'année.
Une curieuse année en vérité qui me fait
penser aux fêtes des calendes de janvier dans la Rome antique.
En ces temps là, le peuple s'assemblait sur sur la colline du Janicule pour
prier le vieillard Janus, le dieu bifront qui donna son nom au premier mois de l'année.
Son visage buriné par les épreuves, sillonné
de rides profondes, regardait se fermer les portes de l'année révolue, pendant que l'autre face, riante et juvénile, se tournait vers la lumière de l'an nouveau porteur de tous les espoirs .
C'est ainsi qu'il nous faut envisager cette nouvelle année.
Au cours de cette année difficile, nous ne sommes pas restés inactifs:
Un nouveau musée dédié à la donation Denis Baston est en cours d'achèvement.
Les travaux de restauration des œuvres
du musée à ciel ouvert se poursuivent.
Enfin notre chapelle des pénitents a reçu sa Croix des outrages qui orne magnifiquement
sa façade. C'est une splendide et rare œuvre d'art qui renforce la vocation artistique et culturelle de notre village.
A cela s'ajoutent la
réalisation par "Tourrettes Art" d'un superbe "point selfie" devant le Musée d'art et d'essais et la célébration de la Fête des Lumières imaginée et portée avec beaucoup d'enthousiasme par le Collectif
des Artistes de Tourrettes .
Que 2021 soit propice à la reprise de toutes nos activités et nous aurons encore beaucoup de belles
choses à partager.
Bonne et heureuse Année ! A l'an que ven !
Gérard Saccoccini
Président de Tourrettes Héritage